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mercredi, mars 18, 2009

139- Abdelkébir KHATIBI est mort.


Hommage posthume

Abdelkébir Khatibi s'en va ! L'homme a marqué la littérature marocaine par son empreinte exceptionnelle





Un autre géant s'en va ! Les deux dernières années n'étaient pas de bon augure pour les lettres et les arts marocains. Le dernier à avoir cédé n'est autre que le grand Abdelkébir Khatibi. Sociologue, politologue, chercheur universitaire et écrivain, l'homme à plusieurs casquettes a rendu l'âme, lundi tôt le matin, dans un hôpital à Rabat. Selon son épouse, son cœur a lâché suite à de graves complications. Il vient ainsi de clore 71 ans de vie, de réflexion, de création et de carrière littéraire. Son histoire commence un certain jour en 1938, à El Jadida où Khatibi voit le jour. Quelques années plus tard, le jeune homme, avide de savoir, part en France pour rejoindre la Sorbonne. Il y étudie la sociologie pour soutenir la première thèse sur le roman maghrébin en 1969. Ayant pris goût à l'écriture, il sort son premier roman autobiographique «La mémoire tatouée» en 1971, sous l'impulsion de Maurice Nadeau. Khatibi ne s'arrête pas en si bon chemin. Il va continuer sur sa lancée en multipliant les parutions. Récits, poésies, romans, théâtre et essais sociologiques… l'homme de lettres aborde les différents genres et registres avec la même ferveur, le même talent et la même maturité intellectuelle qui en font un analyste réputé. Il rejoint l'Union des écrivains du Maroc en 1976 et en devient membre. De retour au pays, Abdelkebir Khatibi va arborer une autre casquette, celle du professeur universitaire. Il enseigne la littérature durant des années à l'Université Mohammed V à Rabat et dirige en même temps le «Bulletin économique et social du Maroc». Ce dernier changera de nom en 1987 et devient «Signes du présent» mais garde toujours Khatibi comme leader. S'il y a quelque chose à retenir de l'existence de ce grand homme, ce sera sans contestation sa polyvalence qui n'affecte en rien la pertinence de ses écrits, ses réflexions et ses opinions. De la société à la politique en passant par la philosophie, l'art, la poésie, le roman… le natif d'El Jadida impressionne par cette grande maîtrise qui en a fait l'un des noms les plus marquants de la scène littéraire marocaine. D'ailleurs, l'homme a occupé plusieurs postes académiques dans des institutions réputées. Directeur de l'ex-Institut de sociologie à Rabat, directeur de l'Institut universitaire de la recherche scientifique et professeur universitaire ad vitam aeternam à la Faculté des lettres et des sciences humaines de l'Université Mohammed V de Rabat… Khatibi avait cette belle capacité d'allier savoir et savoir-faire. Ses nombreux écrits et le patrimoine de plus de 25 œuvres qu'il a laissés derrière lui le disent si bien. Belle plume, réflexion profonde, analyse minutieuse, sens critique prononcé, style audacieux… les écrits de feu Khatibi offrent une vision globale des phénomènes ou des questions qu'il traite. Ce qui ne manque pas de faire le bonheur de chercheurs, d'étudiants et de lecteurs ordinaires assoiffés de savoir et amateur sde son style exceptionnel. L'une des signatures francophones les plus réputées au niveau national, Khatibi a joui de son vivant d'une renommée internationale. Son œuvre lui a valu de nombreuses consécrations notamment «le prix littéraire de la seconde édition du Festival de Lazio d'Europe et de la Méditerranée», «le Grands prix de l'Académie française» (1994), le «Grand prix du Maroc (1998)», «le prix de l'Afrique méditerranéenne/Maghreb» (2003) et le plus récent «le prix du Grand printemps» de l'Association française «Hommes de lettres» pour l'ensemble de ses oeuvres poétiques. Il est devenu ainsi le premier écrivain marocain et arabe à décrocher ce prix prestigieux lancé depuis 1838 par les plus belles plumes françaises. On cite un certain Victor Hugo, Alexandre Dumas et autre Honoré de Balzac. Une trentaine d'ouvrages tous genres confondus, plus de 150 articles, d'études et d'entretiens traduits dans plusieurs langues… Abdelkébir Khatibi en partant a laissé derrière lui un important legs aux amateurs de son verbe et sa verve. L'homme s'en est allé mais son œuvre reste toujours là, témoignant de la plus belle des façons de la valeur de cet intellectuel engagé.

Par Hayat Kamal Idrissi | LE MATIN 16 mars 2009

http://www.lematin.ma

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