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mardi, mars 09, 2010

192- Nassira Belloula : De la pensée vers le papier...


Mon ami Yahia de "Ksentina.Blogspot" a fait cette recension:

Nassira Belloula : De la pensée vers le papier, soixante ans d’écriture féminine algérienne – ENAG – 2009

Une exploration de la littérature féminine algérienne

Nassira Belloula nous livre un travail très intéressant sur la littérature féminine algérienne. Elle passe en revue nombre d’auteures algériennes en posant énormément de questions sur cette écritures, les thèmes abordés et les problématiques qui sont soulevées.
Le livre est structuré sur un plan très rigoureux qui permet d’aborder les thématiques des écrivaines. Les points communs sont repérés et la spécificité de l’écriture féminine est analysée. Le tout est remis dans le contexte plus général de la littérature algérienne.

On suit avec beaucoup d’intérêt l’enquête menée par Nassira sur l’utilisation très fréquente des pseudonymes, ce que Nassira appelle les « noms voilés », non sans quelque malice. Le lecteur est invité à parcourir les différentes périodes de cette littérature depuis celle des fondatrices jusqu’aux auteures modernes en passant par l’écriture de l’urgence des années 90.

Les rapports père-fille et mère-filles sont abordés et déclinés pour beaucoup d’auteures : Assia Djebar, Leïla Sebbar, Karima Berger, Ahlem Mostaganemi, Fatiha Nesrine, Nadia Sebki, Malika Mokkedem, Najia Abeer, Djamila débèbèche, Taos Amrouche, etc…

On prend également conscience que nombre d’écrivaines ont la double culture de par leur naissance et on réalise combien la culture française est prégnante. Énormément d’ouvrages sont écrits en français.

Une bonne partie du livre traite des problèmes spécifiques aux femmes et plus particulièrement aux femmes arabes : la place dans la vie sociale, l’enfermement, les rapports au père.

La lecture de cet ouvrage est agréable et prenante. On y découvre bien des facettes de l’écriture algérienne. A recommander pour tous les amoureux de littérature algérienne.

in: http://yahia-ksentina.blogspot.com/
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Ce qui suit je l'ai trouvé sur le site de l'intéressée : http://nassiralettres.over-blog.com/


De la Pensée vers le Papier (soixante ans d'écriture féminine algérienne) est le titre de mon dernier livre, un essai, paru aux éditions ENAG, oct 2009.
Voici l'introduction et le sommaire

Lorsqu’elle s’aventura dans les sinuosités de l’écriture, voulant arracher de l’anonymat et de l’absence ces voix de femmes étouffées par les traditions de l’enfermement et de la claustration, Assia Djebar ne pensait peut-être pas qu’elle venait de réécrire l’histoire pour une génération de femmes, qui allaient s’engouffrer dans cette voie de l’écriture ainsi balisée dans un processus de dévoilement et d’affirmation. Dès, les tous premiers écrits ; hésitants, curieux, crédules, confus, désorientés de ces premières plumes considérées aujourd’hui comme des pionnières ; Djamila Debeche, Taos Amrouche et Assia Djebar qui de l’écriture ethnographique du départ allait surgir une littéraire forte, contestataire, grave, libératrice. Une littérature toutefois complexe, parfois difficile à assumer d’où des appréhensions et des hésitations, d’où des pseudonymes et des « Je » narrateurs dilués dans des « Je » multiples.
Ces écrivaines, les « nouvelles femmes d’Alger », comme les appelle Assia Djebar[1], dépositaires d’une culture arabo-musulmane, détentrices de la richesse de la parole musicale, poétique, lyrique, conteuse[2] héritées de ces mères et grands-mères qui savaient respecter l’ordre établi qui voudrait, que leurs voix soient chuchotements, soient silences, avaient donc osé briser ce silence, briser le plus significatif des tabous, celui qui interdit qu’une «voix» de femme s’élève et s’entende dans une société qui a construit son système social sur la négation féminine tout comme sur son effacement. La tache ; ardue et complexe de la réappropriation d’un espace et d’un lieu s’est imposée comme un lent processus de réadaptation pour la femme, car le voile ici comme il énoncé clairement dans les écrits d’Assia Djebar, apparaît comme un besoin identitaire et non pas comme un argumentaire de l’enfermement, d’où l’idée de faire du voile un instrument d’expression par lequel la femme algérienne peut reprendre sa liberté. Cette liberté passe avant tout par la parole, il faut conjurer le silence : « Je ne vois pour les femmes arabes qu’un seul moyen de tout débloquer : parler, parler sans cesse d’hier e d’aujourd’hui, parler entre nous, dans les gynécées, les traditionnels et ceux des H.L.M entre nous et regarder. Regarder dehors, regarder des murs et des prisons ! La femme regard et la femme voix.
Dans cette même approche du dévoilement et du poids du regard sur la femme Frantz Fanon parle du voile comme d’une seconde peau que l’on ne peut arracher impunément ; « Et, que le dévoilement rendu possible par la révolution ne peut alors être vécu par la femme algérienne que comme une renaissance à soi et au monde.[3] »L’acte d’écrire est un dévoilement donc et Assia Djebar s’en est rendue compte en écrivant Les Alouettes naïves « pour la première fois, j'ai eu à la fois la sensation réelle de parler de moi et le refus de ne rien laisser transparaître de mon expérience de femme. Quand j'ai senti que le cœur de ce livre commençait à frôler ma propre vie, j'ai arrêté de publier volontairement jusqu'à Femmes d'Alger dans leur appartement, » Maissa Bey repense l’acte d’écrire autrement et selon la perception venue d’une société confinée encore dans ses argumentaires traditionnelles « l’acte d’écriture apparaît essentiellement non pas à un acte de création mais surtout à un acte délibéré de transgression, d’insubordination. Je veux bien entendu parler de l’écriture au féminin » Or, c’est à travers cette écriture que l’existence même de la femme va être revisité et réinventé dans un contexte nouveau, celui de la jouissance de la vie autant qu’individu indépendant et surtout autant qu’identité féminine.
La femme qui écrit et investi donc par ce pouvoir de dire de la parole, cet « espace » réservé jusque là, à l’homme. Cet apprentissage de l’écriture s’est fait au début, d’une façon assez abstraite vu que les premiers romans « La soif » n’était qu’un exercice de style comme l’avait dit Assia Djebar. Plus tard avec «Les Alouettes naïves» et «Les Enfants du nouveau monde» l’auteure prend conscience de ce qu’implique l’écriture féminine dans l’évolution des droits de la femme et peint des femmes moins passives, plus militantes, des femmes qui s’affermissement à travers son écriture et à travers sa propre évolution, vu qu’avec L’amour, la fantasia elle a pu se libérer de ses propres appréhensions (l’autobiographie et la langue française) et récupérer un second souffle révélateur de son immense talent.

Plus tard, celles qui vont la talonner dénoteront notamment d’une nouvelle manière d’écrire, certaines useront de l’autobiographie pour mieux se dire, d’autres pousseront les limites de l’écriture féminine au-delà de ce que nous connaissons. La naissance du "Je" n'a pas été un acte facile, cette acquisition a nécessité aux personnages de l'auteure un voyage au fond de leur intérieur, au fond de leurs mémoires en ayant conscience que la femme qui écrit subit une certaine persécution, comme si elle devait justifier cette écriture aux yeux des autres, car s’interroge-t-on sans cesse, sur cette écriture, sur son fondement ? Sur quoi une femme peut-elle écrire ? Sur l’amour, le sexe, la maternité, la guerre, l’espoir, l’ambition. Cette écriture permet à la femme avant tout autre acte de revendiquer son identité et de se situer par rapport au langage qui reste un pouvoir masculin par sa pratique et sa portée. Car la femme algérienne, arabe en générale avait appris la soumission, par le silence avant tout. La parole ne lui était pas acquise, ni accordée et c’est par le silence qu’elle avait appris à vivre, confinée intérieurement dans un espace clos ou la voix, le cri et la parole sont exclus.
Par ce pouvoir du silence qui reste son seul atout la femme se doit de survivre. Alors qu’intervient la parole, substitut de l’écriture et de la plume comme une transgression, un lever le voile à peine léger d’abord. L’oralité qui lève un voile discret et lui permis d’échapper à sa condition de cloîtrée. Les femmes ont usé de cette parole interdite pour partir et revenir sans cesse, contant des récits, des vies qui leur faisaient défaut comme le disait Malika Mokkedem en parlant des récits de sa grand-mère. Dans l'éducation de la jeune fille, l'accent et surtout mis sur la nécessité d'être soumise, obéissante et silencieuse, n’avoir aucune curiosité vis-à-vis de l'extérieur. Malika Mokkedem échappa à cette réclusion en utilisant ce matériau qui est l’écriture, le dompter même pour en faire un instrument lui permettant d’exister. La place et le rôle de la femme n'ont jamais été abordés sérieusement, et surtout n'ont jamais été remis en cause dans les sociétés arabes. Tout était chose acquise et pas matière à changement. Le rôle de l'homme, et la place de la femme étaient une situation allant de soi, une situation normale. La femme prend la plume et par l’écriture, elle rompe ce silence séculaire et arrive à recréer son univers à la mesure de la souffrance et des attentes féminines. Or, c’est bien dans cette écriture exutoire avant tout, que s’amoncellent les contradictions et cette difficulté d’être du personnage féminin. Pour contourner ces appréhensions (non pas la peur de que diront les autres, mais la peur de soi) de très nombreuses écrivaines ont eu recours au pseudonyme, car outre Assia Djebar, une vingtaine de femmes algériennes, auteures de romans, de recueils de nouvelles ou de poésies toutes générations confondus ont eu recours à un pseudonyme ; Anna Greki, Djamila Amrane, Safia Ketou, M’rabet Fadila, Aicha Lemsine, Ha­kima Tsabel, Hawa Djabali, Bediya Bachir, Belgacem Myriam, Myriam Ben, tout aussi que Nina Hayet, Maissa Bey, Nadjia Abeer, Feriel Assima, Leila Marouane, quant à Nina Bouraoui, elle a changé juste son prénom Yasmina par Nina, et ce geste n’est pas anodin, car il reflète le déchirement de l’auteure et son obsession de paraître « normale » comme les autres. Un prénom « passe partout » oui mais a connotation occidentale et va lui permettre de se fondre dans le paysage sans regard ni pensée hostile. « Ce prénom qui fera de moi une étrangère à Paris ». Il es intéressant de revenir sur l’écriture de Nina Bouraoui, violente et si tranchante avec ce que nous connaissons jusque là de l’écriture féminine.
Ces écrivaines qui se revendiquent donc de la plume, et d’un état d’esprit différent par la force de la création et la réflexion semblent s’éloigner de cette idée émancipatrice ? Est-ce possible aussi que cela soit un moyen d’autonomie le fait de se créer un autre nom, le sien, porté par personne…une manière d’être libre, de ne pas rendre de compte. Difficile de comprendre les motivations des unes et des autres, sauf peut-être de celles qui ont tenté d’expliquer le pourquoi d’un nom d’emprunt et, c’est ce que nous tenterons de comprendre dans cette étude consacrée justement à cette thématique. Toutefois, j’implore votre indulgence du fait que je n’ai tenté dans cette étude qu’un travail sur un sujet qui m’avait inspiré loin sans doute des méthodologies classiques employés par les chercheurs et les spécialistes en littérature, et n’étant moi-même qu’une passionnée de la littérature féminine et de la lecture, j’ai pu et j’ai du sortir des sentiers battus guidée cependant par mon inspiration.
[1] Oran, langue morte, Arles, Actes Sud, 1997, p. 367.
[2] Assia Djebar écrivait dans Les Cahiers « Il y a une culture riche, variée, différente, qui change en Algérie, de ville en ville. Cette culture est musicale, poétique, ludique, érotique…etc. Mais, cette parole de femme fonctionne toujours pour les autres femmes, à voix basse et non pas à voix haute, dans des lieux restreints et non dans les lieux publics ».
[3] In Ecrits sous le voile (romancières algériennes francophones écriture et identité par Laurence Huughe.


SOMMAIRE

Introduction
Première partie : L’écriture fondatrice
Chapitre premier : l’espace du retour

I - Djamila Dèbeche et Taos Amrouche ; l’écriture balisée
a - Aziza de Djamila Debeche

II. -Elissa Rhaïs et les femmes du mouvement algérianiste ;

b - La fille du Pacha de Elissa Rhaïs

III. – La terre apprivoisée

c - Dans l’ombre chaude de l’Islam d’Isabelle Eberhardt


Chapitre deuxième : l’espace du dedans
I - Entre l’affirmation et l’exhibitionnisme

a - Mes hommes de Malika Mokkedem


II. - Silences dévoilés ; Noms voilés

b - L’albatros de Najia ABEER

III - L’appréhension du Je narratif

c - Garçon manqué de Nina Bouraoui

Deuxième partie : L’écriture résistance
Chapitre premier : L’espace de la guerre

I - Lutte, engagement et écriture

a - La grotte éclatée de Yamina Mechakra

II - L’écriture de l’urgence et l’urgence d’une écriture

b - Le blanc de l’Algérie d’Assia Djebar

III - Littérature au Féminin, Du Féminin ou Féministe

c - Mémoire de la chair de Ahlem Mostaganemi

Troisième partie : L’écriture plurielle
Chapitre premier ; l’espace de rupture

I - L’écriture de l’entre deux
II. - Dans la langue de « l’Autre »

b - Je ne parle pas la langue de mon père de Leila Sebbar

III. – La quête d’une appartenance

c - Filiations dangereuses de Karima Berge

Quatrième partie ; l’écriture délivrance
Chapitre premier : l’espace du refus

I – Le père : le visage contrasté de l’écriture féminine

a - L’homme aux semelles de vent de Nina Hayet

II - La relation mère-fille, une confrontation permanente

a - La jeune fille et la mère de Leïla Marouane

Quatrième partie : l’écriture conceptrice
Chapitre premier : L’espace extra-muros

I – Rupture de l’enfermement
a - Un amour silencieux de Nadia Sebkhi

II - L’écriture à bras le corps

c - La baie aux jeunes filles de Fatiha Nesrine

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